La vision du “Parti ISLAH” La Démocratie et l’État de Droit

  1. L’État de Droit

Il n’y a pas de vie démocratique possible sans l’État de Droit, c’est-à-dire un État des institutions où la souveraineté appartient à la loi et le pouvoir au peuple. Parmi les idées les plus répandues en science politique, le principe de la (séparation des pouvoirs) est souvent utilisé comme un critère décisif pour juger si un pays est un État de Droit ou un État démocratique.

Cependant, cela n’est pas tout à fait exact. La séparation des pouvoirs est en réalité relative et parfois théorique, au point d’être parfois en contradiction avec la pratique. En effet, la relation entre les trois pouvoirs se caractérise par la domination du pouvoir exécutif (en particulier la présidence), en raison des prérogatives constitutionnelles (la liste exclusive des domaines juridiques, le monopole de promulgation des Lois, le pouvoir de dissoudre le parlement, la présidence du Conseil supérieur de la magistrature, la nomination du président de la Cour suprême, etc.).

Afin de ne pas nous perdre dans des débats terminologiques, il est plus utile de proposer une vision qui renforce le concept et la réalité de l’État des institutions, qui est l’outil idéal pour la pratique démocratique, indépendamment de la séparation ou de la concentration des pouvoirs.

Selon notre vision, voici un ensemble de propositions qui visent à assurer la bonne marche vers un véritable État de Droit, doté d’une structure constitutionnelle relativement équilibrée entre les pouvoirs, où l’action démocratique peut véritablement s’épanouir :

  1. Élargir le domaine de la loien modifiant l’article 57 de la Constitution, qui délimite de manière restrictive les domaines dans lesquels le Parlement peut adopter des lois, laissant tous les autres domaines de la vie au pouvoir exécutif à travers des règlements administratifs (décrets, décisions, arrêtés, etc.).
  2. Consultation pour la nomination du Premier ministre et de son gouvernementavec les groupes parlementaires soutenant le président. De même, la nomination de certains hauts responsables doit être validée par la loi.
  3. Renforcer les pouvoirs des commissions d’enquête parlementaires, en permettant une intervention automatique et une transmission directe des enquêtes au parquet, sans passer par le gouvernement, ce qui concrétise la séparation des pouvoirs.
  4. Adopter un système électoral à une seule circonscription par régionpour élire les députés de l’Assemblée nationale sur la base de la représentation proportionnelle, comme c’est le cas à Nouakchott. Cela permettrait de mettre fin aux alliances tribales, de réduire l’influence de l’argent politique, et d’élargir la représentation des élites et des classes populaires, pour lesquelles l’appartenance tribale ne répond plus à leurs ambitions politiques.
  5. Retour au système bicaméralavec la restauration du Sénat en tant que chambre haute du Parlement, en élisant un sénateur pour chaque département afin de garantir la représentation locale, avec une élection à la majorité absolue par les conseillers municipaux élus par la proportionnelle.
  6. Respecter l’indépendance totale de la justiceafin de garantir une justice qui atteint ses objectifs d’équité. Cela nécessite :
    • Soustraire au pouvoir présidentiel la nomination du président de la Cour suprême, et son remplacement par un système où il est élu parmi les juges les plus hauts gradés, et validé par le pouvoir législatif selon des critères définis par la loi.
    • Assurer une protection juridique des institutions de l’État (autres que celles de la défense et de la sécurité) face à l’exécution forcée des jugements et décisions judiciaires. Il n’est plus justifié de soustraire certaines administrations publiques au pouvoir d’exécution forcée, alors que la confiance en la bonne foi des responsables administratifs a été ébranlée. L’exécution des jugements est le fondement de la justice, comme le soulignait le calife Omar Ibn Al-Khattab dans sa lettre à Abu Musa Al-Ash’ari : “Il n’est de valeur dans la parole juste sans sa mise en œuvre.”
    • Choisir des membres compétents et qualifiéspour le Conseil constitutionnel, en tant qu’autorité juridique suprême, plutôt que de procéder à une répartition entre les politiciens de la majorité et de l’opposition.
  7. Rationaliser les dépenses administratives: À l’ère de l’informatisation, une seule personne peut accomplir le travail de centaines, donc il est inutile d’avoir un si grand nombre de fonctionnaires dans les administrations publiques. Une grande partie des dépenses publiques ne sont pas nécessaires, et une réorientation des fonds vers d’autres secteurs pourrait être plus productive. Il convient d’examiner les mesures suivantes :
    • Réduire les coûts de l’administration afin de rationaliser les dépenses et de réorienter les économies vers des projets essentiels.
    • Revoir la structure administrative en la limitant à six ou sept circonscriptions, et revenir à une seule circonscription pour Nouakchott avec ses neuf municipalités.
    • Abolir les conseils régionaux, car ces conseils favorisent l’esprit régionaliste plus que la décentralisation, ce qui, dans un contexte socio-politique fragile, pourrait menacer l’unité nationale.
    • Développer la décentralisation en élargissant les pouvoirs des conseils municipaux pour superviser et gérer les services de base liés au développement local (santé, éducation, eau, électricité, propreté, état civil, marchés, tourisme, infrastructures, etc.).
  1. Ancrage de la Démocratie

Le modèle démocratique varie même dans ses moindres détails, selon les conditions d’adaptation et le type de système politique en place (parlementaire, présidentiel, semi-présidentiel). La Constitution de la Mauritanie a opté pour le modèle semi-présidentiel, bien que ces modèles soient importés de l’Occident et nécessitent un ajustement constitutionnel pour les adapter au contexte social et à la réalité politique.

Quoi qu’il en soit, l’instauration d’une démocratie à l’occidentale nécessite la présence de conditions préalables propres à l’environnement dans lequel elle a été produite, dont la plus importante est la possession d’une conscience politique pour éviter les dérives, ainsi qu’un héritage de pratiques politiques comme guide théorique, ce qui manque encore dans notre jeune expérience.

Ainsi, la pratique de la démocratie locale, au niveau de sa concrétisation politique, diffère des applications à reproduire de manière littérale. Cela est compréhensible dans une société qui, jusqu’à récemment, n’avait pour système politique que des formes de gouvernance proches du modèle féodal ou tribale.

Malgré les imperfections du modèle démocratique importé, il est toujours possible de le réformer et d’ajuster les textes en fonction des besoins :

  1. Mécanismes de contrôle des élections: Plusieurs approches existent dans certains pays pour garantir la transparence et renforcer la confiance des électeurs, telles que la supervision judiciaire, administrative ou indépendante (de façon imagée). L’expérience a montré que les systèmes administratifs ou des commissions “indépendantes” n’ont pas donné de bons résultats. Par conséquent, il est préférable d’assigner la supervision électorale au pouvoir judiciaire, qui dispose de la légitimité et de l’indépendance constitutionnelle nécessaires pour assurer cette tâche avec plus de compétence.
  2. Création d’un Code électoral pénalpour encadrer l’utilisation des moyens électoraux et limiter l’interférence des hauts responsables, l’achat des voix avec de l’argent politique, ainsi que la diffusion de discours illégaux dans le cadre de la mobilisation populaire, et lutter contre l’influence néfaste de l’argent politique sur les allégeances politiques dans une société qui n’a pas encore pleinement intégré la culture démocratique.
  3. Création d’un mécanisme juridique de contrôle des finances de campagne, permettant :
    • De fixer un plafond aux dépenses de campagne.
    • L’obligation de déclarer le budget des campagnes.
    • La comptabilité après le scrutin.

 

III. Découpage Électoral

L’idée fondamentale derrière les théories démocratiques est la justice politique, qui est influencée par un facteur essentiel : la géopolitique, c’est-à-dire la géographie politique. En d’autres termes, la répartition géographique de la population, la distribution des ressources et les particularités ethniques affectent l’équité de la représentation électorale.

En raison de cette situation géopolitique marquée par des différences et des disparités, la démocratie ne pourra pas atteindre ses objectifs de représentation égale, de partage des ressources ou d’attention équitable aux besoins publics.

Pour garantir l’équité électorale, il est nécessaire de :

  1. Réajuster le découpage électoralsur la base démographique définie par des données statistiques (X% de la population totale).
  2. Prendre en compte les valeurs statistiquespour déterminer le nombre de sièges électoraux (X% par siège), afin d’éviter que certaines régions ou groupes n’accaparent de manière disproportionnée les sièges. Le recours à la représentation démographique pour la distribution des sièges et des ressources sera une approche plus juste et plus équilibrée.